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Dix Paroles Pour une Vie paisible

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DEUXIEME PARTIE :

Les Dix Commandements à travers la Bible

10. Convoitise, péché originel

Tu n'auras pas de visées sur la femme de ton compagnon. Tu ne convoiteras pas la maison de ton compagnon, son champ, son serviteur, sa servante, son bœuf, son âne, ni rien qui appartienne à ton compagnon.

(Deutéronome 5.21)

Ce commandement représente un enseignement essentiel. Nous allons voir en quoi il est si important. Mais tout d'abord, revenons à la puissance du langage qui, comme nous l'avons découvert à l'occasion des deux chapitres précédents, peut être la pire ou la meilleure des choses.

Dieu agit par la parole

Il est clair que pour assimiler la Loi, l'homme doit d'abord comprendre sa libération, fait d'un Dieu unique, d'un Dieu qui se manifeste par la parole :

Ces paroles, YHWH les a dites à grande voix à toute votre assemblée sur la montagne, du milieu du feu, de la nuée et de la brume et il n'a rien ajouté. Il les a écrites sur deux tables de pierre et il me les a données.

(Deutéronome 5.22)

Dieu a donc révélé sa Loi par la parole, en fait, par elle, il a déjà fait bien plus. D'abord, il a créé par son seul verbe :

Dieu dit : La lumière sera. Et la lumière fut...

(Genèse 1.3)

Chaque acte de la création commence par : "Dieu dit" jusqu'à ce que "le ciel, la terre et tous leurs éléments furent achevés". Alors, Dieu cessa de dire, il acheva en arrêtant ce qu'il faisait. En d'autres termes, il instaura le Sabbat. Quand Dieu cessa de dire, son œuvre créatrice fut arrêtée. La parole de Dieu est donc action. En est-il de même pour celle de l'homme ? Dieu tenta à ce propos une expérience en sollicitant la parole de l'homme afin que celui-ci se trouve une aide :

YHWH Dieu dit : Il n'est pas bon que l'humain soit seul. Je lui ferai une aide à ses côtés. YHWH Dieu forma à partir du sol toute bête de la campagne et tout oiseau du ciel. Il vint vers l'humain pour voir comment il l'appellera et tout ce que lui nommera l'humain "souffle-de-vie" est son nom. L'humain cria un nom pour tout le bétail et pour l'oiseau du ciel et pour toute bête de la campagne et pour Humain, il ne trouva pas d'aide à ses côtés.

(Genèse 2.18-20)

Même avec l'aide de l'action de Dieu (celui-ci "forma"), l'homme est incapable de trouver par sa seule parole "une aide à ses côtés" ou, selon la TOB, "qui lui soit accordée". Dieu lui reconnaît l'usage du langage, mais il est clair que ce dernier va servir à "dominer" et à "soumettre", certainement pas à créer. Pourtant, plus tard, l'homme essayera de s'élever en "disant" :

Ils se dirent l'un à l'autre Allons ! Fabriquons des briques et cuisons-les au feu... Allons ! Bâtissons...

(Genèse Il.3-4)

Ils l'ont fait et ça a commencé à marcher ! Puis Dieu est intervenu en "brouillant leur langue" pour "qu'ils ne s'entendent plus les uns les autres". En effet, dans cette fable, le langage n'a pas un réel pouvoir d'action, mais il permet la formulation du projet et l'organisation sans laquelle le groupe ne jouirait pas de la force du nombre. Grâce à la parole et à la volonté collective, les hommes peuvent tout. "Rien... ne leur sera inaccessible" (Genèse Il.6). L'histoire de la tour de Babel nous enseigne donc que l'homme ne doit pas vouloir devenir aussi puissant que Dieu. Ce dernier ne le lui permettra pas ! YHWH, l'infini immatériel, l'unique créateur a le pouvoir de "faire" par sa seule parole. Par contre, l'homme ne peut accéder à cette capacité. Il peut et même doit "faire", mais par l'action et sans mégalomanie. C'est en effet l'orgueil des Babyloniens qui les a poussés à désirer la réalisation d'un projet aussi audacieusement ambitieux.

Quant à Dieu, s'il a cessé son œuvre créatrice, il va poursuivre, toujours par la parole, son action de guide libérateur et de législateur. Mais maintenant, l'homme va souvent lui servir de "bras" en concrétisant la réalisation de l'action ou de "bouche", c'est à dire de médiateur. Dans l'Ancien Testament, Moïse en est l'exemple le plus complet et le plus parfait :

... Et moi, je serai avec ta bouche et avec sa bouche (celle d'Aaron). Je vous enseignerai ce que vous ferez. Lui, il parlera pour toi au peuple, il sera pour toi une bouche et tu seras pour lui un dieu.

(Exode 4.15-16)

Il ne s'est pas encore levé en Israël un prophète comme Moïse, lui que YHWH connaissait faces à faces...

(Deutéronome 34.10)

Moïse fut donc une exception ! Et force nous est de constater que, s'il ne peut espérer acquérir un pouvoir de réalisation à la dimension de celui de son créateur, l'homme est cependant associé à son projet pour exécuter, alors que Dieu a créé et continue de "dire". En fait, il poursuit son action libératrice par son enseignement :

Dieu prononça toutes ces paroles pour dire : ...

(Exode 20.1)

S'ensuivent les commandements. Le premier s'adresse à la pensée : Dieu se présente libérateur et unique. En étant cela, il permet à l'homme d'accéder à la compréhension des "paroles". En effet, non libéré, celui-ci ne pourrait avoir accès à la Torah, l'enseignement. L'unicité de Dieu est précisément un concept lié à la libération intellectuelle qui est elle-même intimement conséquente a la fin de la servitude subie en Egypte.

Par contre, la dixième et dernière parole impose une restriction à la pensée humaine libérée : Ne pas convoiter. Il s'agit d'une espèce de conclusion, mais aussi d'un fondement : le principe général suffisant pour ne pas être amené à enfreindre les commandements précédents. En ce sens, on pourrait aussi l'appeler "la parole des paroles".

Les dix paroles

Dieu "n'a rien ajouté" (Deutéronome 5.22) à ses paroles parce qu'elles sont complètes. D'ailleurs, on les appelle "les dix commandements". En hébreux, le nombre dix peut signifier "beaucoup" et pas nécessairement dix de façon précise. Mais examinons-les, non pas en tant que "décalogue", mais en fonction des détails de leur contenu :

1. C'est moi le libérateur.

2. Tu n'auras pas d'autres dieux face à moi.

3. Tu ne te feras pas d'idoles, pas d'images.

4. Tu ne te prosterneras pas devant ces dieux, ces images, car je suis jaloux.

5. Tu ne prononceras pas à tord mon nom, car je n'acquitte pas celui qui prononce mon nom à tord.

6. Tu garderas le Sabbat, c'est mon jour sacré. Tu te reposeras, tu te souviendras de ton esclavage.

7. Donne du poids à tes parents et tu seras heureux.

8. Tu ne commettras pas de meurtre.

9. Tu ne commettras pas d'adultère.

10. Tu ne commettras pas de rapt, de vol.

11. Tu ne proféreras pas de faux témoignage.

12. Tu ne convoiteras pas.

Les six premiers ordres concernent Dieu. Ils commencent par la proclamation de la libération. Ils finissent par l'obligation du souvenir perpétuel de cette dernière, par le Sabbat, car Dieu s'est arrêté de créer et c'est maintenant à l'homme de perfectionner l'œuvre. Les six derniers paragraphes nous expliquent les règles de l'action de l'homme. Premier principe, une bonne éducation formera des hommes respectueux de l'éthique. Il faut donc glorifier ceux qui la dispensent, les parents, en leur "donnant du poids" par une conduite conforme à l'enseignement que Dieu offre par la Loi et l'Histoire. Enfin, la parole ultime révèle la source de toutes les fautes : la convoitise.

Une parole clef

Il suffit d'analyser les péchés décrits dans la Bible pour constater qu'ils avaient pour cause l'envie ou la jalousie, cette dernière étant en quelque sorte une émanation d'un désir avide de ce qu'a un autre. Examinons quelques exemples :

Pourquoi Caïn a-t-il tué son frère ? Il était jaloux de la faveur que Dieu accordait à ce dernier. En fait, il enviait cette faveur (Genèse 4).

Pourquoi le roi David a-t-il fait mourir Urie, le Hittite ? Parce qu'il avait désiré sa femme (2 Samuel Il).

Pourquoi les fils d'Israël ont-ils vendu leur frère Joseph ? Parce qu'ils enviaient l'amour particulier que lui portait leur père (Genèse 37).

Et nous pourrions continuer !

Imaginons un monde dans lequel personne ne dirigerait son esprit vers ce qui appartient aux autres : la vie serait bien agréable. Beaucoup des noirs soucis qui l'empoisonnent n'existeraient pas. Bien sûr, le désir sain n'est pas répréhensible. Mais quelle est la limite entre ce dernier et l'envie malsaine ? C'est précisément ce que la Bible nous explique tout au long des textes. Les fautes de l'humanité, puis plus particulièrement celles du peuple d'Israël ne nous sont pas relatées pour dénoncer la mauvaise conduite des personnages afin qu'ils soient mis au ban des nations, au contraire ! Le but de toutes ces narrations est de démontrer à travers l'histoire humaine que l'homme n'est pas parfait, en quoi il pèche et pourquoi. En parallèle, la Loi est offerte en remède. A lire et relire cet amalgame, on ne peut que constater la causalité des chutes : désir avide, envie, ambition démesurée ou mal placée avec, en prime ou plutôt en conséquence, la jalousie noire et malfaisante. L'homme envieux et jaloux peut-il être heureux ?

L'interdiction de convoiter est donc la parole de Dieu la plus essentielle parce qu'elle vise la cause fondamentale de tous les comportements corrompus.

La faute originelle

Mais venons-en au tout premier péché, celui qui a fait perdre à l'homme la jouissance de l'Eden : Pourquoi Eve a-t-elle mangé le fruit interdit ?

Le serpent dit à la femme : Assurément vous ne mourrez pas, mais Dieu sait que le jour où vous en mangerez, vos yeux s'ouvriront et vous serez comme Dieu, connaissant le bon et le mauvais. La femme vit que l'arbre était bon à manger et qu'il était séduisant à regarder, l'arbre désirable pour agir avec clairvoyance ! Elle en prit un fruit dont elle mangea. Elle en donna aussi à son mari qui était avec elle. Il en mangea.

(Genèse 3.4-6)

Eve s'est empressée de manger le fruit parce qu'il était "désirable pour agir avec clairvoyance". Elle voulait donc, elle aussi et à l'instar de Dieu, posséder la "connaissance du bon et du mauvais". (Autres traductions possibles : "du bien et du mal" ou : "du bonheur et du malheur".) Bref, elle a désiré devenir comme un dieu en possédant le savoir.

YHWH Dieu dit : Voici que l'humain est comme l'un de nous par la connaissance du bon et du mauvais. Maintenant, qu'il ne tende pas sa main pour prendre aussi de l'arbre de vie, en manger et vivre à jamais !"

(Genèse 3.22)

L'ambition de la femme était démesurée. La maîtrise du savoir absolu et de la vie appartient à Dieu. Vouloir acquérir la "connaissance du bon et du mauvais", c'est à dire des fondements de l'éthique, équivaut à priver Dieu d'une partie de son pouvoir, de ses fonctions, de sa nature.

L'arbre était bon et séduisant. Pourquoi donc se priver du triple plaisir du goût, de la vue et de l'esprit ? Pourquoi priver ce dernier de la possibilité de s'élever ? N'est-ce pas plutôt le pouvoir qu'allait conférer la connaissance qui intéressait Eve ? Pourquoi, après tout, l'homme ne partagerait-il pas la puissance divine ? Pour ne pas dépouiller Dieu ? Cette notion n'est pas soulevée avant la faute, ni même tout de suite après. C'est seulement en s'adressant à sa cour que Dieu l'aborde. Et il chasse l'homme du jardin d'Eden, non pas pour le punir, cela il l'a déjà fait, mais pour éviter d'être spolié d'un autre avantage. Dieu se met donc à l'abri de la convoitise de l'homme. Mais pourquoi appelle-t-on cette faute le "péché originel" ? Parce que c'est le premier ? Parce qu'il est responsable de tous les autres péchés des hommes ? Ou parce que c'est un péché de convoitise et que cette dernière est la cause de tous les péchés ? Le malheur de l'homme n'est-il pas d'avoir une tendance viscérale à envier ce qu'ont les autres ? Ce désir inassouvi entraîne ses deux corollaires : la jalousie et la mégalomanie. Ces sentiments conduisent à toutes les fautes. Ils poussent l'homme aux pires atrocités. Ils le poussent jusqu'à le faire tomber, car malheureusement, ils font partie de la nature profonde de l'homme. En fait, ils sont ce qu'on appelle son "mauvais penchant".

Mais revenons à Adam et Eve. Cette dernière a-t-elle inventé la convoitise ? Mais non ! C'est un coup du serpent, le perfide. Comme si la perfidie N'était pas un défaut humain ! Peut-être n'est-elle chez l'homme qu'un outil qu'il emprunte pour assouvir ses convoitises. Mais réfléchissons un peu : C'est quand même vrai que, très souvent, les femmes ont tendance à jalouser le voisin plus vite que leur mari. Et très souvent, ce dernier, tout à fait convaincu par sa femme, va se crever le tempérament pour accéder au même niveau, et peut-être même un peu plus, que le fameux voisin. Décidément, les auteurs de la Bible connaissaient bien l'homme ! Adam, le grand niais s'est empressé de suivre sa femme sans réfléchir. Faut-il être bête ! Ou plutôt, que les femmes sont fortes !

Les auteurs du récit étaient-ils misogynes ? Non, je ne crois pas. Je dirai même : au contraire ! Ils devaient probablement, des millénaires avant l'ère la psychologie, être très conscients de la fragilité et de la vulnérabilité de l'homme face aux charmes et à la force mystérieuse de la femme. Ils connaissaient bien leurs propres faiblesses !

A première vue, la désobéissance de Eve n'était pas bien grande : manger un fruit. A qui cela pouvait-il nuire ? L'action en elle-même n'est pas répréhensible. Par contre, la pensée qui motive cette action, la convoitise, est inacceptable et de surcroît, l'objet convoité appartient à Dieu ! Pourtant, contrairement aux bâtisseurs de Babel, Adam et Eve n'ont rien entrepris de grandiose pour tenter d'accéder à la puissance divine. La faute est restée au niveau de la volonté de réaliser le désir. Mais ce dernier était frappé d'interdiction. Le fruit défendu symbolisait, en effet, la limite imposée par Dieu aux hommes.

"Au commencement", la limite séparait le divin de l'humain. Puis, par après, elle s'est étendue pour imposer les droits individuels et collectifs. La Loi ne fait que préciser cette limite originelle. L'homme ne peut donc désirer ce qui ne lui appartient pas, que ce soit le pouvoir de Dieu, la moindre parcelle de son essence infinie ou encore la plus petite possession d'un autre humain, à plus forte raison, la richesse des puissants :

Quand tu t'assoiras à la table d'un puissant, tu discerneras bien qui est devant toi. Tu mettras un couteau sur ta gorge si tu es glouton. Tu ne convoiteras pas ses mets et lui, le pain des illusions.

(Proverbes 23.1-3)

A quoi bon, en effet, envier ce que l'on ne peut avoir ? D'autant plus que la richesse est fugace et qu'elle ne comble pas :

L'amoureux de l'argent ne se rassasiera pas d'argent, ni du revenu l'amoureux de l'opulence. Cela aussi est fumée ! ... Qu'il mange peu ou beaucoup, le sommeil de l'ouvrier est doux et la satiété du riche ne le laisse pas dormir !

(Qohélet 5.9-11)

Alors, pourquoi courir vers tous les maux en jalousant les autres ? Est-ce là le meilleur moyen pour être heureux ? Sachons distinguer la saine bataille pour une vie agréable de la course contre le voisin !

En résumé, l'envie, la jalousie, l'orgueil et la mégalomanie sont l'expression du "mauvais penchant" que l'homme s'est empressé de suivre dès après avoir été créé et qui lui fera commettre toutes sortes de méfaits envers et contre son propre bonheur.

La faute que l'on dit "originelle" un péché de convoitise. Adam et Eve n'ont pas été punis aussi sévèrement seulement pour avoir désobéi, mais surtout parce qu'ils ont désiré accéder à la grandeur de Dieu. Mais bien qu'originel, ce mauvais penchant inhérent à l'individu, l'homme se doit de le combattre :

Chacun est tenté par sa propre convoitise qui l'entraîne et le séduit. Une fois fécondée, la convoitise enfante le péché et le péché, arrivé à la maturité, engendre la mort.

(Jacques 1.14)


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